Juillet, le mois des fruits rouges au jardin, le mois des confitures (groseilles, cassis, framboises) .
Tiens framboise ? Cela ravive quelques souvenirs de boisson au miel. Une certaine mythologie appelle cela une boisson divine.
Sans se prendre pour des dieux, je sais par expérience qu’un grand nombre de mortels n’hésite pas à s’asseoir à une certaine table divine afin d’y déguster ce breuvage.
Mais comment appeler cette boisson à base de framboises et de miel : hydromel framboise ? Sacrilège, le législateur nous en défend, alors frambomel, framboisemel, tout cela est un peu compliqué, au vocable peu élégant, restons entre nous, hydromel framboise nous suffira et tant pis pour la suite.
Ce constat nous porte à penser qu’il serait intéressant de passer à la réalisation de cette boisson.
Quelques dizaines de litres en bonbonne suffiront à caresser certains gosiers gourmands.
Les framboises cueillies sont mises en jatte et écrasées. Rapidement les ferments passent à l’action, après quelques jours une croûte se forme, des bulles apparaissent en surface. Le levain est actif, il est temps de passer à la réalisation du moût.
C’est là que certaines difficultés risquent d’apparaître. Une quantité de miel correspondant au nombre de litres et au degré d’alcool recherchés est mise à chauffer jusqu’au frémissement afin de neutraliser les impuretés et éliminer les ferments indésirables.
Mais voilà, nous sommes en juillet le 14 d’après le calendrier, c’est déjà l’époque où de vieilles abeilles fouineuses aux antennes bien affûtées rôdent dans les parages à la recherche de quelque provende. Dans ce cas particulier il serait bon de s’enfermer soigneusement afin de ne pas être dérangé par ce genre de trouble fêtes ailés.
Une ancienne cuisine équipée d’une cheminée avec âtre sert de laboratoire (miellerie, hydromellerie), une plaque de tôle obstrue le l’entrée de la cheminée. Porte et fenêtre sont hermétiquement fermées ; le retranchement semble parfait aucun intrus ne peut pénétrer.
Le miel est mis à chauffer sur un réchaud à gaz et l’odeur alléchante du miel chaud commence à se répandre dans la pièce lorsqu’au bout d’un certain temps la porte s’ouvre, une Dame apparaît, mon épouse qui vient aux nouvelles. Une abeille virevolte dans la pièce puis une autre : tu as laissé entrer des abeilles ! Non j’ai fait attention ! La preuve que non, il y a des abeilles qui sont entrées !! Et là je sens que la discussion prend un mauvais virage. Les intruses sont sorties à coups de balayette afin qu’elles ne finissent pas dans la sauce.
Et pourtant, quelques instants plus tard d’autres abeilles apparaissent.
Il y a un trou !!
Tous les coins et recoins de la pièce sont passés en revue, même le trou de la serrure, le siphon de l’évier ? Ce n’est pas possible elles ne remontent pas les égouts.
Et pourtant, le nombre d’abeilles présent dans la pièce augmente. Il y a de quoi s’arracher les derniers cheveux qu’il vous reste.
Tel le révérend père Gaucher tournant dans son antre autour de ses chaudrons en proférant des injures vers le divin, j’essaie de comprendre ce problème plus que particulier, l’explication n’apparaît pas. La forteresse semble imprenable tout a été étudié pour que ça ne passe pas, et pourtant, ça passe !!
La sauce du futur hydromel ayant suffisamment chauffé je sors de la pièce, puis le nez en l’air j’observe les abeilles qui virevoltent à l’extérieur face à la porte et face à la fenêtre. Soudain mon regard se porte vers la souche de la cheminée : tout s’éclaire ! Je découvre l’énigme de ce dilemme, tout autour du mitron tournoient quelques avettes rusées.
C’est de là que s’échappe l’odeur du miel chaud si excitant et si agréable sur les antennes de ces dames. Descendant au travers de la cheminée vers la source de ces senteurs, c’est par un interstice, un rai de lumière que ces fouineuses pénètrent dans le sanctuaire, tels des commandos.
Mais voilà, il ne suffit pas de posséder la formule pour pouvoir pénétrer dans la caverne d’Ali Baba, il faut également avoir dans sa poche celle qui permet de pouvoir en sortir.
Les pères Noël du 14 juillet ne l’avaient pas…