L’abeille est l’avenir de l’homme…
Congrès de Villefranche - octobre 2008
À la tribune : deux apiculteurs américains (3000 et 8000 ruches),
un jeune apiculteur de Rhône-Alpes (quelques centaines de colonies).
Les premiers racontent leur déclin de professionnels et la mort programmée de leurs abeilles qui, parcourant des milliers de kilomètres, de pollinisation en miellée, disparaissent ; avec plus de 50 % de perte annuelle, avec parfois des ruchers entiers vidés de leur habitantes, le renouvellement des reines et des colonies devient une gageure. A eux seuls incombe la charge de trouver les responsables et, devant cette impossible tâche, ils portent l’injuste culpabilité de l’hécatombe.
Moment d’émotion aussi lorsque notre jeune collègue professionnel témoigne de son désarroi en constatant, à l’hivernage 2007, sur un rucher de 89 colonies, la disparition de 90% d’entre elles : il a passé l’hiver à gratter cadres et caisses.
Moment d’espoir lorsque, de l’hivernage effectué sur pollen et miel récoltés en altitude, il résulte une mortalité réduite à 19 % tandis que celle des colonies ayant fait leur saison en plaine, côtoyant l’agriculture industrielle, s’élève à plus de 50 %.
L’évidence est là : l’utilisation démentielle des pesticides reste la principale cause de tous ces ravages.
Cette évidence-là n’est pas apparente à la lecture du rapport du député Martial Saddier au Premier ministre.
Après avoir constaté que « la surmortalité des insectes pollinisateurs n’est pas contestable », les priorités du rapport s’orientent vers « la recherche, le développement, la production du patrimoine génétique et le contrôle parasitaire » et « l’urgence d’organiser une filière abeille ou apicole », en réaffirmant l’abeille comme nouvelle « filière animale ».
Certes, quelques mesures préconisées semblent intéressantes : statut de l’apiculteur, déclaration obligatoire des ruches, création d’un institut technique et scientifique de l’abeille, mise en place d’une filière de production de reines, lutte contre le frelon asiatique… mais la cohabitation avec les PGM reste de mise et les pesticides ont le champ libre, ainsi que le montre l’autorisation concernant le CRUISER.
Et pourtant l’abeille est l’avenir de l’homme.
1er juin 2007, dans mon rucher du Perche : récupération d’un petit essaim secondaire mis en place sans trop de ménagement dans une 10 cadres, faute de ruchette disponible ; nourrissement sans réduction de l’entrée ni partition (!!!)
Fin juin : évidemment, constat de pillage
Début juillet : je décide de disperser, les pillardes s’échappent, pas de couvain, un ridicule petit essaim se reconstitue autour de la jeune mère empêchée de pondre, recluse dans un coin. Je récupère cette ″ non-valeur″, remise en ruchette cette fois, nourrie avec cadre de miel, avec partition, réduction de l’entrée, et choix d’un autre emplacement : le grand jeu, pour tenter de me faire pardonner.
On me paye en retour : beau couvain, à telle enseigne que la colonie, mise en ruche, rattrape et dépasse tout le monde en septembre.
Hivernage des colonies uniquement sur les cadres de miel et de pollen conservés depuis le printemps.
Février 2008 : démarrage express de ladite colonie.
Mars : nourrissage au miel
Avril : elle devient énorme, avec 8 cadres de couvain compact.
Très mauvais temps : difficile de diviser dans ces conditions.
Je décide d’attendre l’essaimage, qui survient le 25 avril 2008 en présence de Sidonie, ma petite fille de 5 ans, ravie. Avec elle, mise en ruche immédiate de ce très gros essaim qui produit très vite une hausse sur le colza.
Par ailleurs, nous en profitons pour constituer à partir de cette généreuse souche six ruchettes avec cellule de mère et couvain, en les renforçant.
La période de trois semaines de beau temps qui s’ensuit (à noter dans les annales) permet fécondation et développement rapide des nouvelles colonies.
Fin juin, j’en fais profiter mes amis dont les abeilles avaient pâti d’un mauvais hivernage.
Alors, « essaim de juin, chagrin » ? Il faut voir ;
Grâce à cette belle histoire,
Dont voici la morale à laquelle il faut croire
Tel apprit de l’abeille
Qui croyait lui apprendre
Quant à la Société Centrale d’Apiculture, elle se porte plutôt bien : en pleine rénovation de ses locaux, elle offrira bientôt un nouveau visage. Il en sera sans doute de même pour le rucher pédagogique du parc Georges Brassens et pour le rucher-école du Jardin du Luxembourg, où les auditeurs sont de plus en plus nombreux : une liste d’attente est déjà ouverte pour la session 2010 !!
Ainsi, nous continuons à apporter notre modeste contribution à la sauvegarde de notre abeille, à l’initiation des élèves et à la formation des apiculteurs et du grand public dans les meilleures conditions.
Ensemble, faisons donc en sorte
…que l’homme soit l’avenir de l’abeille